10.16.2014

PANCHO, DANIELA ET L'ASCENSEUR.

(Ou l’histoire du chemin entre un rêve et la réalité).


Début 2011, mon ami Pancho Ayguavives, architecte de son métier, s’installe dans un spacieux triplex situé aux derniers étages d’un bel immeuble  du centre de Gaillac, dans le Tarn.

Le bâtiment, retenez ce détail, n’a pas d’ascenseur.

Environ 70 marches à se taper pour monter au triplex et pareil pour en descendre.

Pancho est un homme à la soixantaine avenante et il continue à travailler chez lui sur de nombreux projets de rénovation, surtout dans le centre historique de la ville.

C’est tous les jours la même cérémonie : parcours à pied des chantiers le matin, ordinateur les après midis, sans compter les courses à faire, les cafés dans le bar de la place, etc.

L’escalier de l’immeuble devient petit à petit un obstacle obsédant.

Daniela est franco-suisse. Elle a un élégant savoir faire dans l’aménagement de ses propriétés. Elle a du goût, l’obsession des détails bien réalisés et les moyens pour les financer. Elle est en plus la propriétaire de presque tous les immeubles qui forment l’îlot où habite Pancho.

Avec le temps Daniela et Pancho sont devenus des amis.

Il se trouve que le seul immeuble de l’îlot qui n’appartient pas à Daniela est un petit bâtiment d’angle, mitoyen avec celui de Pancho.

Il s’agit d’une petite construction organisée comme tant d’autres : une petite boutique au RDC et le logement du propriétaire dans les niveaux supérieurs. La boutique donne accès au logement.

Un beau jour Pancho remarque que le commerce est loué et les étages vides, parce qu’inaccessibles sans passer par la boutique.

Cette observation déclenche en lui une idée presque romantique : Il faudrait acheter le petit bâtiment d’angle, rendre accessibles ses étages à travers l’escalier de l’immeuble voisin et, surtout, installer un ascenseur commun à l’ensemble des deux bâtiments. Un rêve pour qui se tape tous les jours ces soixante-dix marches obsédantes.

L’idée d’un ascenseur fédéré venait de naître !!

À l’attaque !

Mon ami l’architecte est allé rencontrer la propriétaire de l´immeuble (eh oui, encore une femme) et elle s’est laissé convaincre pour vendre son petit bâtiment.

Puis cet homme têtu a dessiné un avant-projet et l’a soumis à Daniela, ce qui a donné le feu vert à une période de variantes en tout genre, après quoi elle a finalement acheté l’immeuble qui lui manquait.

À partir de là le dossier du permis de construire, convaincre les puissants Bâtiments de France de la beauté de cette rénovation et, détail pas du tout banal, l’architecte Ayguavives a cherché -et obtenu- des subventions de l’Etat pour aider à construire un duplex sur les niveaux supérieurs du petit immeuble d’angle, après quoi est arrivé le temps des appels d’offres, entreprises sélectionnées, marchés et autres. Rien n’a échappé au duo Daniela-Pancho.

Deux ans après le début des cogitations, les travaux ont démarré et en Noël 2013 la façade était entièrement rénovée (voir photo), mais l’ascenseur devrait encore attendre quelques mois.

Finalement, le 12 octobre 2014, anniversaire de la découverte des Amériques, a démarré le montage de cet ascenseur tant rêvé.

Le prochain 5 décembre Daniela, Pancho et ses amis vont fêter la naissance du petit monstre, qui sera équipé de miroirs, ça va de soi, puisque tout le monde sait qu’il n’y a rien de plus ennuyant qu’un ascenseur sans miroirs.

Mon ami l’architecte Pancho Ayguavives m’a fait remarquer, pendant qu’il me racontait ce roman-fleuve, que tandis que l’œuvre d'un peintre termine dans la toile, le boulot d'un architecte est bien plus compliqué.

En effet!

Pierre Roca